La cabrette, cet instrument de musique que l'on perd de vue !
La cabrette, l’histoire !
Le XIX siècle est celui de l’âge d’or de l’instrument. Tous les bals Auvergnats de Paris et de la région sont donnés au son de cet instrument et le nombre de cabretaires en activité est important. Le succès est tel que, ces bals prendront le nom de l’instrument : tout d’abord le bal à la musette qui deviendra par la suite le «bal musette». Les Auverpins, terme utilisé par jean Richepin entre-temps écrivain, critique d’art, avocat, originaire du cantal, décrit très bien un de ceux-là : Le cabretaire est juché dans une logette suspendue au mur, à laquelle il accède par une échelle mobile qu’on retire dès qu’il est installé. Les danseurs sont en place aussitôt que la cabrette se gonfle. Aux premières notes, ils partent, courent, glissent, martèlent le plancher à grands coups de talon, poussent par intervalles des cris aigus.
Vers la fin du siècle, arrive un nouvel instrument dans les bals parisiens, un instrument tout récent qui se popularise de plus en plus. Il s’agit de l’accordéon, tout d’abord diatonique. Celui-ci va concurrencer la cabrette à tel point qu’à Paris, les cabretaires sous la houlette de Louis Bonnet, Eugène Guitard et Joseph Soulier forme la société «la Cabrette» dans le but de défendre les intérêts des musiciens auprès des patrons de bal et ainsi préserver le caractère régional des bals musette souvent fermés par la préfecture de police à cause des désordres et des bagarres.
Les bals musette sont les uns après les autres fermés par la police. Pourtant ils sont très honorables, comme les Auvergnats eux-mêmes qui constituent un dixième de la population de Paris et un centième des délinquants. Selon Roger Girard, journal d’un Auvergnat à Paris 1886, la police a remarqué que les seconds ont tendance à contaminer les premiers.
Au pays, les dissensions n’en sont pas moindres. Rapportée en 1 895 par le journal l’Auvergnat de Paris, voici une anecdote qui rend bien compte de la situation. À Soulages-Bonneval, Jany joue de l’accordéon au café Austry quand Alexandre Cros de Laguiole arrive avec une musette. Tout le monde lui demande une valse. Il accepte pourvu que ce soit Jany qui continue à faire la quête même à ce prix, celui-ci ne veut pas céder sa place. Bagarre générale. Cros a une oreille coupée.
C’est en 1906, d’après les historiens que le couple se forme, à l’arrivée de Charles Péguris d’origine Piémontaise au bal d’Antoine Bouscatel, ils commenceront à jouer ensemble et feront naître un duo légendaire : le couple cabrette-accordéon. Mais petit à petit, l’accordéon prendra le dessus. Comme nous pouvons le constater avec les enregistrements de l’époque, au début l’accordéon accompagne le cabretaire, puis il prend le dessus, tout cela pendant les années trente. Auparavant, la cabrette est enregistrée seule.
Dès la fin de la première guerre mondiale, l’accordéon commence à remplacer la cabrette. Robert Arribat, lors d’un entretien avec Michel Esbelin se souvient qu’à la fin des années vingt, lors d’un bal à sainte Geneviève sur Argence, endroit où il est originaire, François Cancelier venu jouer à la fête du pays fut chassé par certains jeunes agacés par son instrument jugé trop démodé. En effet, l’accordéon devenu semi-chromatique, pouvait jouer les danses et airs modernes alors que la cabrette ne le pouvait plus.
Définition et Composition
La cabrette encore appelée musette est un instrument à vent de musique traditionnelle auvergnat de la famille des cornemuses. Apparue au XIX siècle, dans la communauté auvergnate de Paris, elle s’est ensuite rapidement répandue en Auvergne, notamment dans le Cantal et dans les autres hauts pays environnants.
La cabrette est constituée d’un porte-vent qui relie le sac à un soufflet pour l’alimentation e air. Autrefois, le sac en peau de chèvre (d’où le nom de l’instrument) se gonflait à la bouche comme la plupart des cornemuses. L’ajout du soufflet remonte au milieu du XIX siècle.
De plus, l’instrument comporte un tuyau mélodique à anche double, le hautbois qu’on appelle aussi «le pied». Il est à perce conique et est souvent tourné en bois d’ébène, en palissandre ou encore en buis. Sa tonalité est toujours donnée en centimètres. On parle par exemple d’un «pied de 39» pour un Hautbois en Do mais il en existe de différentes longueurs et de différentes tonalités.
Il y a également un tuyau d’accompagnement accolé au pied appelé bourdon. Il n’est pas toujours fonctionnel et il est souvent obturé. Il permet d’utiliser la note dominante grave de l’instrument à la fois comme effet rythmique et comme pédale harmonique.
Répertoire et occasion de jeu
La musique pour la cabrette est essentiellement axée sur la danse. En effet, tout cabretaire a dans sa tête et ses doigts nombre d’airs de bourrées, mazurkas, polka, scottishs et autres marches ou valses. Il existe cependant, une grande quantité d’airs accompagnant des moments de vie tels que des marches de noces ou regrets. Ces deux derniers sont très présents bien évidemment lors des mariages.
Néanmoins, les mariages ne sont pas les seules activités auxquelles participent les cabretaires. Il n’est pas rare de les voir accompagner les conscrits pour la quête des œufs, participer au tirage au sort pour l’armée, jouer pour les fêtes patronales ou conduire les convives à la Saint Jean, lorsqu’ils allaient voir les buronniers. Les enquêteurs du CNRS ont pu participer à l’une de ces célébrations dans un buron du nord Aveyron toujours en 1964.
Aujourd’hui, la cabrette n’a plus du tout la même fonction qu’au début du XX siècle et ce jusque dans les années soixante, car même si elle joue encore dans des bals, c’est loin d’être l’instrument maître. Elle a été supplantée par l’accordéon dans les orchestres musette ou évincée par les groupes de variété ou par les dicos mobiles.
Heureusement, nous remarquons qu’il y a toujours de nombreux musiciens qui la font vivre et l’enseignent.